Les Conseils Citoyens

Mis en place par la "fameuse" loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 (loi Lamy), les conseils citoyens sont des dispositifs participatifs qui regroupent au minimum une quinzaine d’habitants et d’acteurs locaux et/ou associatifs au sein des quartiers politiques de la ville.

Les conseils citoyens, késako ?

Encore méconnus du grand public, les conseils citoyens (qui ne sont pas les conseils de quartier) existent depuis 2014.
Mis en place par la "fameuse" loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 (loi Lamy), les conseils citoyens sont des dispositifs participatifs qui regroupent au minimum une quinzaine d’habitants et d’acteurs locaux et/ou associatifs au sein des quartiers politiques de la ville.

Ces instances sont obligatoires dans les quartiers prioritaires et participent au pilotage de la « politique de la ville » (la politique des quartiers fragiles) ainsi qu'à la mise en place de projets sur le terrain. Dans certains territoires ils ont remplacé les conseils de quartiers, dans d'autres, les deux dispositifs subsistent.

L’esprit des conseils citoyens est de devenir un acteur essentiel des quartiers prioritaires, via leurs membres dont les missions sont de :

Réunion d'un conseil citoyen, en mode descendant

Des instances très différentes en fonction des quartiers où ils se trouvent

Comme beaucoup de dispositifs propres aux quartiers sensibles, leurs actions sont très variées et dépendent principalement du territoire ou ils se trouvent ainsi que des acteurs qui les composent.

De fait, sur les 1157 conseils citoyens de France, tous développent des approches différentes : dispositifs délibératifs, balades urbaines pour repérer des problèmes, cafés citoyens pour favoriser l’expression des habitants, ateliers en mode co-design, réunions publiques plus traditionnelles, etc..
.

Une évaluation des conseils citoyens a été lancée récemment mais elle dispose encore de peu de conclusion.

=> https://irev.fr/thematiques/participation-citoyenne/outil-impact-des-conseils-citoyens-dans-la-politique-de-la-ville

Un dispositif obligatoire et règlementaire

De manière purement réglementaire, les conseils citoyens participent aux instances officielles qui pilotent la politique de renouvellement des quartiers sensibles, en premier lieu les « contrats de ville ». Dans chaque territoire, les contrats de villes sont élaborés pour plusieurs années, ils fixent les objectifs et le cadre d’intervention à suivre pour transformer les quartiers prioritaires.  

Les Conseils Citoyens participent également à la gouvernance des projets de renouvellement urbain. Leur participation doit permettre d’éclairer les orientations stratégiques et d’enrichir les discussions par l’expression des différents points de vue.

🔎 Le chiffre :

On compte un peu plus de 1500 quartiers politique de la ville en France. 1157 disposent d'un conseil citoyen.

L'appellation de conseil citoyen s'apparente au fonctionnement d'un label.

Pour être considéré comme tel, le dispositif doit répondre aux principes de la loi Lamy (en savoir plus) et des chartes conçues par chaque territoire.

Une réunion créative d'un conseil citoyen, avec co-construction de projet. Le panel semble cependant peu diversifié.

👥  En tant que dispositif représentatif, le conseil citoyen garantit un principe de parité entre les hommes et les femmes. C'est dans cette idée de représentativité que le conseil est composé de deux collèges, les habitants et les acteurs locaux et associatifs. Les membres du collège habitant sont soumis à un tirage au sort afin d'assurer une certaine représentativité.

Un tirage au sort à géométrie variable

La procédure de tirage au sort diffère en fonction des quartiers et des conseils citoyens. Dans la plupart des cas, le tirage se fait à partir de plusieurs listes (registres des bailleurs sociaux, adhérents à un centre social, listes électorales…). Des listes de membres volontaires peuvent aussi être utilisées. Parfois même, des personnes bien identifiées au sein du quartier sont nommées d'office par les instances officielles, sans tirage au sort.

Le tirage au sort du groupe d'habitant est obligatoire, les conseils citoyens n'ont par contre aucune directive quant à la formalisation de celui-ci.

Des instances indépendantes

🏛️ Les conseils citoyens doivent également garder une certaine indépendance vis-à-vis des pouvoirs publics afin de garantir un fonctionnement en autonomie tout en conservant une logique d'échanges avec les différents acteurs publics.

Ni les représentants de l’État, ni les élus ou les agents en charge de la politique de la ville ne peuvent être membres de cette instance.

Une forte reconnaissance des habitants et une légitimité garantie par une participation "éclairée"

💪  La mise en place des conseils citoyens conduit à reconnaitre les habitants et acteurs locaux comme des partenaires à part entière de la politique de la ville.

Ainsi le dispositif est caractérisé par un principe de co-construction et de forte encapacitation : dans certains territoires, les membres des conseils citoyens sont ainsi formés aux problématiques qu'ils discutent, à l'instar de dispositifs comme les ateliers citoyens ou les conférences de consensus, à l'occasion desquels les panels de citoyens tirés au sort sont formés pendant un ou plusieurs jours par des personnalités qualifiés.

Les limites actuelles des conseils citoyens

Un projet citoyen emblématique mais non institutionnalisé

Comme il est facile de le remarquer, ce dispositif est assez flou.

Le premier constat est la grande "irrégularité" entre les conseils citoyens, qui sont à la fois un dispositif "réglementaire" et un "label" qui ne s'obtient pas selon les mêmes critères d’un territoire à l’autre.

De fait il existe beaucoup de Conseils Citoyens qui "vivotent" et qui ressemblent plus à des cases administratives à cocher qu’à de véritables organes intégrés et/ou décisionnaires dans la mécanique des quartiers prioritaires. Ce positionnement « mou » fait que les Conseils Citoyens sont à la fois peu identifiés par les habitants des QPV et en même temps peu outillés par les équipes municipales qui - à leur décharge - ne disposent encore pas de méthodes et outils ayant fait la preuve de leur pertinence.


Les chercheurs Jeanne Demoulin et Marie-Hélène Bacqué (auteure du rapport Bacqué en collaboration avec l'éducateur de rue Mohamed Mechmache) ont exposé quelques unes des principales limites des conseils citoyens :

🤝 Le principe de co-construction prôné par les conseils citoyens peut également être questionné lorsque l'on connait les éléments traités et débattus par ces instances... Les enjeux très politiques ou liés au développement du territoire ne sont pas (ou peu) dans leurs prérogatives et ils ne jouent pas un rôle décisionnel.

En effet, les sujets traités restent souvent cantonnés à des questions de second plan ou d'ordre pratique.

→ Pas sûr que choisir la couleur des façades ou l'emplacement de bancs relève d'une transformation démocratique profonde (on schématise, nous savons bien que dans certains quartiers on trouve des dispositifs plus ambitieux que cela et heureusement).

🔒 Le principe d'indépendance dont dispose les conseils citoyens vis-à-vis des pouvoirs publics est à nuancer car ils restent dans un giron très institutionnel. Leurs moyens (notamment financiers) dépendent donc du bon-vouloir des acteurs publics (on retrouve un peu le même problème chez les centre sociaux). Ce cadre institutionnel ne favorise pas la liberté d'expression. Pire encore, ce cadre peut contribuer à créer un blocage, voire même a favoriser une forme de honte à évoquer des difficultés liées au vécu et à des phénomènes sociaux qui peuvent être parfois tabou.

Dommage, c'est pourtant l'intérêt de faire participer les citoyens : avoir une vision sensible et personnelle des espaces et expériences vécus.

Faire des conseils citoyens l'instrument de la participation citoyenne dans les quartiers prioritaire



Les ambitions des conseils citoyen sont d'être un acteur relais entre citoyens et institutions. Pour concrétiser ces ambitions, il faut adopter une communication adéquate afin d'apporter légitimité et visibilité à ce dispositif.

Une réunion plus classique d'un conseil citoyen, le panel est à nouveau peu diversifié

Le conseil citoyen doit pouvoir être reconnu et appréhendé par les habitants comme un acteur de confiance à travers lequel ils peuvent s'exprimer. La communication et les ateliers proposés doivent donc être vraiment en phase avec les points d'intérêts et les problématiques du quartier.

👉 Pour cela, nous prônons d'opérer une participation qui se joue "hors des murs". Nous entendons par cela de limiter le cadre institutionnel dans lequel les démarches participatives prennent habituellement place. Il s'agit par exemple de mettre en place des ateliers dont la forme, le lieu ou la temporalité sont davantage en adéquation avec les habitudes des participants. L'idée est d'élaborer une dynamique participative qui entre en résonance avec les préoccupations réelles habitants, devenant ainsi naturelle :

Permettre l'expression d'un public plus large accroit de ce fait la visibilité et la légitimité du dispositif, que cela soit aux yeux des habitants tout comme des acteurs publics.

C'est pourquoi il est essentiel d'élaborer une stratégie globale à l'échelle du quartier dans laquelle le conseil citoyen s'inscrit comme un outil qui vient alimenter cette dernière.

👉 L'autre enjeu clé est de déterminer des sujets qui intéressent réellement les habitants.

Cette stratégie débute par l'identification de manière partagée des points d'intérêts et des problématiques d'un quartier. Cela permet de définir une vision commune et de prioriser le champ d'action.

Il s'agit également pour les conseils citoyens de se doter d'une feuille de route composée de  sujets présentant un fort potentiel de désirabilité, d'implication et d'innovation (agriculture participative, culture et co-construction, conception et gestion de communs, événements sportifs, ...). Ces sujets permettent aux conseils citoyens d'aborder des enjeux concrets, visibles et bien appropriés par les habitants, dans toute leur diversité.

Pour terminer, et en réponse à l'interview "polémique" du JDD du 8 aout 2023 (premier numéro sous une ligne éditoriale-d'extrême droite), interview dans laquelle l'actuelle Secrétaire d'État à la Politique de la Ville Sabrina Agresti-Roubache plaide pour "une simplification des démarches administratives et la fin de la politique du chéquier", chez Ygor on pense au contraire qu'il faut plus d'argent ! Mais plus d'argent pour :
- booster et faire essaimer les dispositifs qui marchent pour promulguer la citoyenneté active et des projets de transformation profonde pour les quartiers prioritaires ;
- se donner les moyens d'une vraie politique d'innovation et d'évaluation ;
- mettre en lumière le travail des acteurs créatifs pour montrer tous les possibles et diffuser de belles histoires ;
- transformer les quartiers et l'image que les citoyens qui y vivent en ont, pour transformer leur rapport à la république ;
- FAIRE vite, voir GRAND, avancer STEP BY STEP.

Ressources et liens utiles :

Impact des conseils citoyens dans la politique de la ville

https://irev.fr/thematiques/participation-citoyenne/outil-impact-des-conseils-citoyens-dans-la-politique-de-la-ville

http://www.reseau-crpv.fr/le-reseau/